Bienvenue, curieux voyageur

Avant que vous ne commenciez à rentrer dans les arcanes de mes neurones et sauf si vous êtes blindés de verre sécurit, je pense qu'il serait souhaitable de faire un petit détour préalable par le traité établissant la constitution de ce Blog. Pour ce faire, veuillez cliquer là, oui là!

2 août 2025

1089. Moretto & le Loup

 

MORETTO & LE LOUP

Le garde me traîne dans la pièce comme si que j’étais un vulgaire sac à puces, tirant sur ma chaîne tel un gosse sur la laisse d'un roquet. La douleur me pique le cou, mais je riposte en grognant et en dévoilant mes crocs – des beautés de toute beauté, si je puis me permettre, capables de faire trembler n'importe quel dentiste nazi ou de chez Pol Pot. Le type esquive, la trouille lui déformant le visage, avant de se souvenir qu’il est censé jouer les durs. 

" Fais gaffe, sale clebs, ou tu vas laper l’eau des chiottes avec une paille en fer !" bafouille-t-il, sa voix tremblotante trahie par une odeur de panique qui ferait fuir un putois.
Je ricane, les babines retroussées. " Oh, mon grand, on sait tous les deux qui chie dans son froc face au Grand Méchant Loup. Et je te rassure : c’est pas moi."

Son visage se crispe, sa bouche ressemble à une fermeture éclair coincée. Sa main glisse vers le bâton à sa ceinture, mais une voix sèche le coupe net : " Ça suffit comme ça, gardien. Faites votre boulot sans transformer mon client en punching-ball avec vos frustrations."

Je jette un œil par-dessus l’épaule du garde-chiourme. Un gros barbu est assis à une table, dans une pièce si mal éclairée qu’on dirait l’antichambre d’un film d’horreur à deux balles. Une ampoule clignote dans une niche, protégée par une grille, comme si que j’allais me faire la malle en grimpant aux murs. Le mec barbu et au front dégarni est engoncé dans un costume hors de prix, avec des cheveux tirés en arrière et un visage bouffi comme une vieille pomme oubliée au soleil. Il pue l’eau de Cologne, la soie et… un vague relent de paille pourrie. Bizarre. Mais le plus intrigant ? Pas une goutte de peur. 
Soit il est con comme un balai, soit il est aussi tordu que moi. Et ça, ça promet. Le gardien attache ma chaîne à un anneau au sol, me laissant juste assez de mou pour atteindre la table et ma chaise, et verrouille la porte grillagée avec un cliquetis théâtral. Il recule, l’air de dire « je te surveille, hein ». Le barbu rajuste ses lunettes et fusille le maton du regard. " Laissez-moi seul avec mon client, s’il vous plaît.
- Mauvaise idée, mon pote ", grogne le gardien en me lorgnant. " Vous savez qui c’est, non ? 
- Évidemment que je le sais," rétorque le bonhomme, acide comme du vinaigre. " Et je sais aussi que les droits de l’accusé, ça existe. Vous voulez un cours de droit ou vous dégagez ? "

Le garde marmonne puis s'éloigne dans le corridor en secouant la tête. Je m’étire, faisant claquer mes chaînes comme un rockeur en plein solo, et secoue ma fourrure grise pour la faire gonfler. " Client, hein ? C’est mignon. J’ai pas le souvenir d’avoir engagé un gros lard en costard pour me défendre."
Il me gratifie d’un sourire huileux. " Pas encore, je vous l'accorde, mais attendez d’entendre mon offre. Vous allez me supplier de bosser pour vous.
- Vraiment ? " je bâille, exagérant à mort. " Et pourquoi je ferais ça, Monsieur… ?
- Parce que je peux vous éviter de finir vos jours à ronger des barreaux." 

Mes oreilles frémissent malgré moi. Je masque ça d’un grognement narquois. " Peu probable. Ils ont un dossier en béton armé contre moi.
- Justement, c’est pour ça que vous avez besoin de moi." Son sourire s’élargit, glissant comme de la gelée sur une descente alpine. Il pose une carte de visite sur la table avec une délicatesse de magicien. " Permettez-moi de me présenter." 
Je baisse les yeux. « Maître D-M., avocat pénaliste, spécialiste de la défense des accusés à tort. » Les lettres noires dansent sur un fond blanc, avec un rouet doré en guise de logo. Subtil. " Maître D-M. ? Laissez-moi deviner, Ducond-Morett- "

Il lève une main potelée pour m'arrêter avant que je puisse finir de prononcer son nom. " Je préférerais qu'on évite de prononcer mon nom ici. Les murs ont des oreilles et je ne voudrais pas que vos co-détenus ne vous prennent pour un de mes protégés. " Ses dents jaunies scintillent tandis qu'il sourit à nouveau.
" D'accord ", dis-je en secouant une oreille. " Avocat pour animaux, maintenant ? Votre ancien métier de défenseur de pédo-pervers ne vous convenait plus ?
- Disons que c'était devenu beaucoup trop… laborieux depuis que certaine affaire a traversé l'Atlantique. Je trouve ma nouvelle carrière bien plus enrichissante. Elle n'a pas non plus nécessité beaucoup d'adaptation, d'un point de vue éthique je veux dire."

Ses dents jaunies brillent comme un phare dans la brume. " Appelez-moi Mister D. Et vous, je vous appelle comment ?" 
Je hausse les épaules, un geste que j’ai piqué aux humains et perfectionné à ma sauce. " La plupart des gens hurlent ‘Au loup !’ avant de détaler comme des lapins quand ils me voient.
- Charmant. Disons Monsieur Leloup, alors." Il se cale dans son siège, l’air d’un roi sur un trône en carton. " Je connais les grandes lignes de votre affaire, Monsieur Leloup. Mais j'aimerais entendre votre version." 
Je ricane, un son grave qui fait vibrer la table. " Ma version ? Oh, comme c’est mimi de demander. D’habitude, les gens s’en tiennent à la version où je suis le grand méchant qui veut niaquer tout le monde. C’est comme ça que les contes fonctionnent, non ?
- Donc, vous ne niez pas les accusations ?  
- Nier ? " Je penche la tête, un sourire carnassier aux babines " Ça gâcherait le plaisir. Ils veulent me coller sous la hache ou dans une cage ? Qu’ils essaient. Mais je vais pas leur mâcher le boulot."

Le gros sort un mouchoir et nettoie ses lunettes avec une lenteur exaspérante. " Donc, vous avez traqué Pierre et ses amis, tenté de croquer un canard…
- Ce volatile m’a filé entre les canines," je grogne, théâtral. " J’ai encore le goût de ses plumes dans les gencives. Un vrai gâchis.
- Et les trois petits cochons ? Leurs maisons démolies ? 
- Pas ma faute si leurs baraques étaient pas aux normes en vigueur." Je roule des yeux. " Ils ont voulu jouer les pyromanes après, ces porcs. J’y ai cramé la moitié de ma fourrure. Vous savez le nombre de lunes que  ça prend à repousser ? 
- Et la gamine et sa grand-mère ? Dévorées, si je ne m’abuse ?"
Je glousse. " Et le chat. Tout le monde oublie le chat. Mais franchement, le bouffer a pas vraiment valu le détour. Réveillé au bord d’une rivière, bourré de cailloux, trois opérations et un cône en plastique pendant six mois… Merci, le bûcheron. Il est le prochain sur ma liste si je sors d’ici, cet enfoiré."

Mister D. remet ses lunettes, imperturbable. " Donc, vous êtes coupable. Et ils ont tout ce qu’il faut pour vous clouer au mur." 
Je retrousse les babines, mi-sourire, mi-menace. " Je suis le méchant, mon pote. C’est dans le script. Je fais des trucs moches, et la morale de l’histoire, c’est que je finis mal. C’est comme ça." 

Il hausse un sourcil broussailleux. " Et si je vous disais que l’histoire peut changer ?"
Je plisse les yeux. " Pardon ? 
- Mon job, Monsieur Leloup, ce n’est pas de prouver que vous êtes innocent. C’est de faire de vous une victime." Son ton est mielleux, mais ses yeux brillent d’une lueur tordue. " On va parler de votre passé tragique, de votre enfance difficile, des préjugés qui vous collent à la pelure, des dévorages consentis de vos victimes Tout le monde vous voit comme une bête sanguinaire. C’est leur faute, pas la vôtre."

Je clignote des yeux, abasourdi. " Vous… vous voulez me faire passer pour une pauvre victime ? Moi ? 
- Exactement." Son sourire est maintenant carrément diabolique. " On vous pose devant les caméras, on vous vend comme une victime des circonstances. Un peu de storytelling, et hop, vous êtes un martyr, pas un monstre. 
- C’est tordu." Je secoue la tête. " Pourquoi pas juste graisser la patte au dirlo de cette taule et me laisser filer ? Je suis doué pour disparaître."
Il ricane. " Fuir ? Être traqué comme un vulgaire renard ? Vous valez mieux que ça. Avec moi, vous aurez une tanière confortable, du gibier à gogo, peut-être même un petit bois rien que pour vous. Quelques mois en taule, et je vous décroche un deal en or. Les deals, c’est ma spécialité."

Je le dévisage, les crocs serrés. " Et vous, vous gagnez quoi là-dedans, Mister D. ? Un os à ronger pour votre bonté d’âme ?"
Il éclate d’un rire sec. " Oh, non. Interviews, plateaux télé, contrats d’édition. Ça, c’est du cash, Monsieur Leloup. Et j’en prends la part du lion."

Je grogne, dégoûté. " Vous voulez me faire jouer les victimes pleurnichardes ? Que je renie ce que je suis ? Tout ça pour que vous puissiez vous gaver sur mon dos ?"
Il hausse les épaules, l’air supérieur. " Vous n’êtes pas un saint, Monsieur Leloup. L’usurpation d’identité d’une vieille mamie, ça vous dit quelque chose ? C’était pas franchement honnête. 
- C’était stratégique," je rétorque, la fourrure hérissée. " Un prédateur doit être malin. Pas comme vous, à vendre des bobards pour du fric."

Il ouvre une mallette, en sort un stylo-plume doré avec un geste de magicien raté. " Signez ici, et je fais de vous la star tragique de l’année."

Je le fixe, et quelque chose en moi craque. Moi, une victime ? Moi, le Grand Méchant Loup, geindre devant des caméras pour échapper à la taule ? Non. J’ai fait des choix. C'est ma nature. J’ai croqué, j’ai démoli, j’ai grogné. Et j’assume. Ce type, avec son sourire visqueux et ses plans tordus, est un méchant d’un autre genre. Le genre qui me donne envie de vomir mes tripes.
" Écoute, Ducond," je gronde, ma voix vibrante de menace. " Je suis un méchant, et je l’assume. Plutôt crever en cage que de jouer votre petit jeu pathétique. 
- Soyez raisonnable…" commence-t-il, mais je bondis, tirant sur la chaîne jusqu’à ce qu’elle chante. Mes pattes claquent sur la table, je hurle, ma bave volant partout, éclaboussant son costard, sa barbe, ses lunettes et son front dégarni. Il bascule en arrière, s’étale comme une crêpe, sa mallette et son stylo valdinguant à travers la pièce. Il se relève, blême, et sprinte vers la porte. L’odeur de sa trouille envahit la pièce, épaisse, délicieuse. Pas si malin, finalement. Il s’arrête, cogne sur les barreaux de la porte, et me lance un regard. " Ils vous verront toujours comme un monstre. Ils vous traqueront pour toujours."

Je hausse les épaules, soudain fatigué. " Peut-être. Mais si je veux que ça change, je dois commencer par être honnête avec moi-même. Même un vilain carnivore tel que moi peut tenir à son honneur, non ? D'ailleurs, je suis pas lycophage, j'ai jamais bouffé un de mes semblables, preuve que j'ai aussi de la morale" 

La porte s’ouvre, le garde apparaît." Alors, ça s’est bien passé, moonsieur l'avocat ? Il vous a pas mordu ?"
Ducond-Moretto rajuste son costume, l’air dégoûté. " Putain, terminé les bêtes sauvages. Je retourne défendre les pédos, c’est moins dangereux !"
Je ricane, m’affalant dans ma chaise. " Alors bonne chance, Ducond. Passez le bonjour à Jean Chibritte."

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1 août 2025

1088. L' Extinction du Réel

 

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L'EXTINCTION DU RÉEL
Comment la vision annonciatrice de la simulation de Jean Baudrillard est devenue notre condition incontournable

Vous connaissez Jean Baudrillard, le Nostradamus du non-sens, qui en 1981, quand MTV passait encore des clips vidéo et qu’Internet était juste un jouet du Pentagone, a pondu « Simulacre et Simulation ». Mort en 2007, juste quand Facebook devenait le roi du monde, il a raté le grand cirque des stories Instagram, des danses TikTok, des lynchages sur Twitter et des enterrements sur Zoom. Sacré veinard ! 

Et pourtant, ce compatriote a prédit notre réalité actuelle avec une précision qui fait presque peur – ou qui ferait rire, si c’était pas si pathétique. Sa phrase fétiche ? « Nous vivons dans un monde où il y a de plus en plus d’informations et de moins en moins de sens. » Oh, comme c’était visionnaire. Votre téléphone vibre comme une abeille enragée avec des notifications, votre fil d’actualité dégouline de drames inutiles, et votre cerveau ? Il patauge dans un océan de contenu aussi profond qu’une flaque d’eau. 

Mais la sagesse, bordel ? Et la compréhension, nom d'une pipe ? Désolés, elles sont en rupture de stock, noyées sous des tonnes de fake news et de memes recyclés. Baudrillard avait flairé le coup il y a des lustres : un monde où que les copies sont plus sexy que les originaux, où la réalité est juste une vieille blague qu’on a oubliée.

Quand les copies jouent les divas
Baudrillard et ses « simulacres » – des copies qui se prennent pour le messie sans rien derrière. Votre feed Instagram ? Pas un album photo, mais une usine à illusions. Chaque selfie est filtré, recadré, légendé pour vendre une vie qu'existe que dans la tête des influenceurs. Une peinture médiévale montrait un vrai roi. L’émoji couronne ? Il renvoie à un vague délire Disney, qui renvoie à un autre délire Disney, ad vitam æternam. Bienvenue dans le palais des glaces de la futilité.
Le grand manège des simulacres, c’est en quatre actes : d’abord, on copie le réel. Ensuite, on le tord, comme une pub pour soda qui vend du bonheur en canette. Puis, on fait semblant qu’y a jamais eu d’original. Et au final, la copie devient la star, la carte bouffe le territoire, et le menu est plus appétissant que le plat. Baudrillard a dû bien se marrer en écrivant ça. Prenez les Ifugao, ces pauvres types étudiés par des anthropologues sur l'île de Luçon aux Philippines. Dès qu’ils ont senti les regards intéressés, ils ont surjoué leur « authenticité » : costumes plus clinquants, rituels dignes d’Hollywood. Les études ont circulé, et devinez quoi ? Les nouvelles générations de ces Ifugao ont lu ces bouquins pour apprendre à être… eux-mêmes. La copie a gobé l’original. Ça vous rappelle pas quelque chose ? On vit tous comme des stars de télé-réalité, posant pour des caméras invisibles, consultant TikTok pour savoir comment être « authentique ». Pathétique, non ?

Les hypermarchés, temples du toc
Poussez la porte d’un supermarché, et boum, la théorie de Baudrillard en néon vous saute à la gueule. Les pommes brillent comme des voitures de luxe (merci le polish), les légumes ont l’air photoshopés. La nature ? Trop moche, trop difforme. On veut du parfait, du lisse, du simulacre. Les tomates du marché, avec leurs bosses et leurs vers ? Beurk, pas assez Instagram-compatibles. On préfère le faux, parce qu’il est plus propre, plus sexy, plus… faux. EuroDisney, au moins, assume son artificialité. Le reste du monde ? Il fait semblant d’être vrai tout en étant aussi bidon qu’un décor de cinéma. Demandez à un gamin de dessiner une princesse, il vous sortira du Disney pur jus. La simulation a kidnappé son imagination, et il ne s’en rend même pas compte.

La politique, ou le cirque des simulacres
En politique, Baudrillard doit se marrer dans sa tombe. Les campagnes ? Des opérations de branding pour des politiciens qui ont plus rien à vendre à part des slogans à la mords-moi-le-noeud. Les électeurs ? Des consommateurs qui choisissent leur camp comme on choisit une marque de baskets. Les experts ? Ils pondent des rapports qui citent d’autres rapports, dans une orgie de papier sans lien avec le réel. La « politique fondée sur des preuves » ? Un joli conte pour adultes où qu’on sélectionne les études qui flattent nos biais. Les consensus ? Une simulation d’objectivité qui écrase toute dissidence avec un « les experts du GIEC sont tous d’accord », point barre. La gauchiasserie se perd dans ses théories universitaires sur l’oppression, transformant la révolution en Instagram esthétique avec tote bags et hashtags. La droite ? Elle vend de la nostalgie bidon et des guerres culturelles en ligne, sans jamais construire quoi que ce soit de concret. Les deux camps se gavent de contenu sur leurs ennemis, mais quand il s’agit de gouverner ? Zéro, peau de balle. Le système adore ça : canaliser la rage dans des conflits bidons pendant qu’on reste tous spectateurs d’un théâtre politique minable.

Accros au vide
Baudrillard avait pas prévu à quel point on deviendrait junkies du faux. Les likes sur Instagram ? Une dose de dopamine qui nous laisse plus seuls que jamais. Les applis de rencontre ? Un supermarché de l’amour où on swipe comme des robots. Les trackers de fitness ? Ils gamifient votre santé jusqu’à ce que vous couriez pour un score, pas pour vous. Tout est optimisé, quantifié, transformé en contenu pour cerveaux en manque. On adore les simulations parce qu’elles sont plus jolies que la réalité. 
Le burger de la pub McDo est plus sexy que celui qu’on vous sert, mais on continue de croire que c'est celui-là qu'on va se bouffer. Pourquoi ? Parce que la réalité est moche, pleine de défauts, et qu’on n’a plus la patience pour ça. 
Notre cerveau, ce traître programmé, gobe les récompenses bidon comme si que c’étaient des médailles d'or. On est des drogués du faux, et on en redemande. Et le pire, c'est que même critiquer ce système, c’est jouer son jeu. Baudrillard lui-même était coincé, baragouinant son jargon académique pour dénoncer l’inauthentique. Si tout est simulation, comment en sortir ? La réalité virtuelle et le métavers ne font qu’enfoncer le clou : bientôt, demander ce qui est réel sera aussi ringard que de porter des jeans taille basse.

Des miettes de réel ?
Baudrillard, dans un élan d’optimisme inattendu, parlait de « poches de réel » – des moments où que l’authenticité perce le brouillard du faux. Un sourire pas calculé, une œuvre d’art pas faite pour les likes, un contact brut avec la nature. Mais soyons sérieux : même cette idée d’authenticité sent le romantisme poussiéreux, une simulation de plus. La vraie issue, si elle existe, c’est de jouer le jeu en connaissance de cause. Utiliser les réseaux sociaux sans se faire bouffer par eux. Faire de la politique sans se noyer dans son cirque. Ralentir, arrêter de vouloir tout commenter, se concentrer sur qu'est-ce qu’on peut toucher, voir, sentir. Votre voisin, pas le dernier scandale sur X. Votre rue, pas une cause à l’autre bout du monde.

Le courage de s’ennuyer
La révolte ultime ? Accepter de s’ennuyer. Admettre qu’on a pas besoin d’avoir un avis sur tout. Laisser tomber les grands débats pour nettoyer son quartier ou discuter avec de vrais gens, pas des avatars. 
Hannah Arendt parlait d’un « espace d’apparence », où des citoyens se réuniraient pour causer de trucs concrets. Pas sexy, mais réels. Oubliez les pétitions virales et les tweets enflammés. Une réunion de quartier, c’est chiant, mais c’est là que les choses se passent. On peut pas fuir la simulation – elle est partout. Mais on peut choisir où poser son regard. La texture de votre café, le rire d’un ami, la lumière sur un mur. 
Baudrillard a jamais dit que la simulation était le diable, juste qu’elle était totale. À nous de décider ce qu’on en fait. Être présent dans un monde qui veut votre distraction, c’est peut-être pas la révolution la plus discrète, mais c'est la plus radicale. 

Alors, quand c'est qu'on commence?