CHEZ SHIMO
Y'a un bar à sushis, ces espèces de tapas japonais, sur le quai de la Poisse où que j'aimais bien aller quand que j'étais à l'école d'astrographie. La spécialité, c'était les poisons chimiquement neutralisés.
C'était au fond d'un étroit cul de sac donnant sur le quai. Y avait un petit néon rouge marqué "Shimo" au dessus de la porte en bois. Une volée de marches d'escaliers grinçantes, peintes en bleu de nuit bien écaillées à cause des milliers de foulages de semelles.
À l'intérieur, y avait un bar étroit affublé de cinq ou six tabourets. Des posters de Gundam et des reproductions de Hokusai ornaient les murs. Et Shimo se tenait derrière le bar.
Il était chimiste. Sorti major d'Osaka Daigaku en biochimie et biologie marine ou un truc dans ces eaux là. Quoi qu'il en soit, c'était aussi un fabuleux cuistot.
Par dessus tout, j'adorais sa salade d'anémones de mer aux châtaignes d'eau. Shimo réduisait le niveau de toxines de ces cnidaires jaunes dans son bioréacteur afin de les rendre comestibles et épicées en même temps que citronnées, un peu comme une huître pimentée avec un arrière-goût de novocaïne.
N'importe quel mec normal comme toi ou moi qui aurait tenté de vouloir se goinfrer d'une de ces salades sans le traitement préalable de Shimo aurait terminé sa soirée avec l'intérieur de la gueule tapissée d'ampoules purulentes et en respirant avec une paille.
Mais à sa sauce, elles étaient délicieuses et sans danger.
Il préparait aussi un plat de nouilles Udon avec des tentacules piquantes de physalie, la mortelle méduse portugaise. Ouais bon, en fait, ce sont pas vraiment des méduses mais - peu importe, on s'en tape. Les tentacules, d'un bleu électrique, s'enroulaient comme des brins d'ARN autour des pâtes safranées comme si elles voulaient se les niquer dans le bouillon, et bien entendu, il neutralisait la plus grande partie des toxines avant de servir.
Mais faut tout de même que tu saches que tous ces nématocystes là-dedans étaient dotés d'aiguilles bio-cellulaires montées comme sur des ressorts. Y avait pas intérêt à avaler plus d'un bol de ce genre de tambouille dans la même soirée. Ce truc faisait grimper les peptides ainsi que la taille du membre associé à un niveau vertigineux.
Mais bon, si un jour tu vas là-bas et que t'abuses un peu trop de cette soupe, pas de sushi : tu pourras toujours te soulager facilement le sgeg car le bar à Shimo est continuellement rempli de vénusiennes trop bonnes et pas farouches qui raffolent de ses concombres de mer au beurre de foie de fugu qu'elles adorent s'envoyer en roucoulant dans les toilettes...
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