Bienvenue, curieux voyageur

Avant que vous ne commenciez à rentrer dans les arcanes de mes neurones et sauf si vous êtes blindés de verre sécurit, je pense qu'il serait souhaitable de faire un petit détour préalable par le traité établissant la constitution de ce Blog. Pour ce faire, veuillez cliquer là, oui là!

29 juil. 2007

257.Un temps bien de chez nous


Il y a quelques temps , je m’étais pris la tête (la vôtre aussi sûrement) sur l’énorme incertitude qui règne dans le milieu de la physique en ce qui concerne le Temps.
Le monde vivant est d’un autre ordre… parait-il. Du moins dans cet univers, sur notre planète.
Les organismes vivants sont formés de molécules et d’atomes et nous vivons sur cette planète sous certaines condition spécifiques de gravité, de pression et de vitesse de rotation.

Ces conditions « mortes », physiques, sont celles qui ont conditionné la tailles de nos cellules – (Pourquoi les cellules sont elles si petites ? Pourquoi n’existe-t-il pas de cellules plus grandes ?) , la taille et la structure des animaux et celle des végétaux.
La vie a surgi sur cette planète, en adéquation avec ses conditions. Avec sa taille, son atmosphère, son eau, son Soleil et sa Lune… avec ses jours et ses saisons.
Le cycle des plantes est en parfaite adéquation avec les saisons, simplement parce que les plantes ont évolué selon ces conditions, « suivant » ces conditions.
Ça me fait sourire d’entendre les religieux s’émerveiller sur la perfection de la création – La « création » évolua selon ces conditions, donc elle était « parfaite » pour ces conditions : Ben allons donc, mais c’est évident !

Ceci pourrait nous emmener à penser que le Temps biologique est de type Newtonien – égal en toutes parts, stable, unique et quantifiable. Grossière erreur, les aminches ! – le Temps biologique est lui aussi relatif.
Le Temps, son rythme d’écoulement, est totalement différent pour une souris qui ne vit qu’un an que pour un éléphant qui en vit 150. De nombreuses bactéries ont trouvé la manière de se multiplier encore plus rapidement qu’il n’en faut à leur unique molécule d’ADN pour se reproduire, en arrivant ainsi à « gagner du Temps » en dépit de la logique biologique.

Un exemple plus concret et plus proche de nous – la perception du Temps d’un enfant de cinq ans est totalement différente de celle d’un papy de 75 ans. 
Mettez les deux côte à côte dans un compartiment de train Corail pour un voyage de quelques heures, le marmot se mourra d’ennui et l’ancêtre sursautera en se disant « Nom d’un petit bonhomme ! Déjà arrivés ? J’ai pas vu le temps passer ! »

Mais peut-être bien que dans notre monde, le Temps réèl dans lequel évoluent les organismes vivants est il régi par le métabolisme et par les rythmes circadiens. Nos horloges internes entament leurs chrono sur les chapeaux de roue pour désaccélerer lentement jusqu’à l’arrêt total en fin de parcours.
Le temps pour Bébert, le moustique éphémère qui ne vit qu’un jour est bien différent du Temps de ce qui l’entoure, il est même concevable que pour lui, ce monde même n’existe pas.
Il commence à bouger, il éclot de son œuf et il fait ses premiers pas dans ce qui pour nous équivaut à nos dernières heures de sommeil. Il passe son enfance, son adolescence et atteint l’age adulte avant notre pause café matinale, alors qu'on a le menton encore dégoulinant de miettes de biscottes et de marmelade. Il rencontre une moustique, fornique avec elle pour se reproduire et a déjà vécu la moitié de sa longue vie hasardeuse à l’heure de notre steack-frites.

Pour Bébert, là-bas dans le lointain, quelque part, il y a un vaste monde immobile, doté d’un rythme de Temps tellement, mais alors tellement lent, que ce pauvre insecte ne perçoit même pas ou à peine les changements et déplacements qui surviennent autour de lui. Et s’il les perçoit, ceux-ci sont tellement lents et flous qu’ils n’ont aucune espèce d’importance sur son emploi du Temps.

Le Temps – même en Biologie – est un casse-tête à définir.

28 juil. 2007

256. Amants de pacotille


Amants de pacotille

Rencontre aux marches du palais,
Contemplative un bref instant ;
Il tomba fou de sa beauté,
Elle s’éprit de ses brillants.

Dans une alcôve ils s'assouvirent,
Lui excité, elle empourprée :
Un soir d’automne ils se promirent,
Souhaitant unir leurs destinées.

Au soir de l’an sans prévenir
Il la plaqua sans repentir
Mettant un terme à leur serment.
Adieu alcôve, adieu palais :
Lui tombé fou d’autre poupée,
Elle s’enquit d’autres diamants ...

Ah les femmes!!!!

9 juil. 2007

255. Quand les rats quittent le navire...

Ce ne fut pas une visite à laquelle je m’attendais, sinon j’aurais fait un brin de toilette, me serais rasé, changé de calbute - peut-être bien avec mon second ou avec l’un de mes deux lieutenants -, mis un peu de parfum, sans doute même aurais-je disposé des fleurs dans ma cabine et retourné les draps de lit de ma couchette. Mais ce ne fut pas une visite romantique non plus comme vous n’allez pas tarder à le comprendre.

Les premiers signes de sa visite se manifestèrent par une congestion cérébrale - vous savez, le nez qui suinte comme les parois de l’aven Armand, les sinus qui s’embourbent et cette barre qui vous traverse les arcades en s’accrochant à vos sourcils comme si sa vie en dépendait.

Alors sans plus attendre, je vais vous le dire sans détours ni fioritures, la putasse de Maria Palud n’est qu’une salope, la dernière des salopes, qui profite toujours de ce que vous ayez le dos tourné ou une situation stressante sur les épaules pour ramener sa fraise.

Au début, je croyais que c’était une dingue dengue, une de ces maudites femelles native des tropiques qui, quand elles vous caressent à rebrousse-poil, vous laissent sur le carreau, pantelant comme un nouveau né chatouilleux.
Mais non, dès cette nuit là, elle y alla de ses préliminaires. Je me mis à suer puis à congeler, à suer de nouveau puis à recongeler, un véritable gymkhana entre Inuvik et Tombouctou.
Et c’est au lendemain de ces trois premières nuits d’ivresse au large de Z.... que nous fûmes appelés, dès les aurores, à la rescousse d’une déesse grecque.

Nous étions donc en pleine opération de sauvetage de l’A....a, 6000 tonneaux bourrés d’électronique et de matériel de pointe de chez "X...... Offshore", et qui avait une énorme voie d’eau dans ses compartiments machines à une vingtaine de miles des côtes , du côté des champs pétrolifères de T........ Fallait lui refiler des motos pompes puis la ramener sur une hauteur fissa avant qu’elle ne chavire et ne parte par le fond rejoindre ses petits neveux les Tritons.

Ouais, ben je pense qu’A....a en avait marre de la vie car elle se montra beaucoup plus accueillante et conciliante que moi envers la Maria qui ne se pointe que rarement non-accompagnée de la Grande Faucheuse. 
Faut pas venir se plaindre si on y laisse des plumes quand on laisse toutes ses portes et fenêtres grandes ouvertes et qu’on refuse l’aide providentielle qu’on veut vous apporter sous prétexte qu’on aime pas les piqûres ou qu’elles vous font froid dans le dos.
Ce n’est donc qu’une fois que l’A....a fut déclarée perdue et que mon navire fût dérouté sur le port le plus proche afin d’y embarquer du matos anti-pollution que je me résolus enfin à aller voir un médecin pendant l’escale. 
Goutte épaisse de circonstance, frayeur et froncements de sourcils des médecins locaux. D’aprés les résultats de mon analyse, j’aurais dû être mort ou sur le point de l’être.
Après m’avoir injecté une dose à terrasser un cheval pour faire tomber la fièvre, prescription de quinine - 9 fois 500mg à raison d’un cacheton toutes les huit heures et aspirine - puis retour à bord. J’avais rien bouffé depuis 3 jours à part un bol de Quaker Oats quotidien et matinal, le reste ne passant plus. Sitôt avalé le premier cacheton que je me mets à gerber. Du blanc suivi de jaune d’œuf. 
C’est de la bile tout ce qui a de plus biliaque. Y’a plus rien dans ma chaudière. La fièvre qu’était tombée suite à l’injection reprend les rênes, accompagnée d’une céphalée temporale gauche horrible et pointue et de délires « passionants ».
Comment qu’on dit la France en Croate ? Ah oui, Francuska. Et l’Allemagne ? Ça je sais, c’est Njemacka. Et la Suisse alors ??? Euh, Švicarska. La Grèce, ça, je connais aussi, c’est Grčka. Et la Hollande ? Pitain, comment qu’on dit la Hollande, Ô putain de bordel de merde, help me, pleeeeaaase…

Merde, je dors plus, mes entrailles me déchirent. Je me lève, je me pose sur le trône. Nom de Zeus, du brut de brut. Et pas de la Veuve Clicquot. C’est tout noir, c'est luisant comme du cambouis, même couleur, même texture. Ça me donne envie de gerber. J’ai juste le temps de me pencher sur le lavabo. J’hallucine, même produit, même odeur, on dirait du fuel lourd, le pétrole extrait dans ces eaux là. À croire que j’ai hérité d’un deuxième trou de balle. Je me dis que c’est du sang qu’a tourné au vinaigre, du sang de pestiféré. 
Le matin, je me lève pour le début des opérations anti-pol. Je suis fébrile, je fonctionne en zombie. Toute la journée. Le soir, je me recouche, je grelotte. 
Comment c’est la Hollande en croate, meeerdeuh ??? Je tremble de partout, je sais plus comment me poser. Et je continue à dégueuler mes cachetons sitôt que je les avale. Je vais crever, c’est sûr. 
Deuxième nuit en mer. Chaque grincement des structures de mon navire, chaque raguage de la chaîne dans l’écubier, résonnent à mes oreilles comme un barrage d’artillerie, chaque battement d’aile de la moindre mouche à merde comme le vrombissement du rotor d’un Eurocopter gravitant à deux mètres au dessus de ma tête. Assourdissant et flippant. 
Faut que je calme ces questions à la con qui me burinent la cervelle.

C’est quoi la Hollande en croate déjà ? La Hollande, putain de Batavia des moulins et des tulipes, comment qu’y z’appellent ce putain de plat pays à la con chez les Dalmates ? C’est le pays des vaches frisonnes et de l’Edam cheese, non ? Les grosses boules rouges d’Edam cheese comme on en trouve dans la price list de mon shipchandler attitré.  
Et Dame Cristalle dans tout ça, qu’est ce quelle devient Dame Cristalle ? Que deviennent les seins somtptueux et laiteux de Dame Cristalle B36 ? Što se događa sa raskošnim I mlječnim grudima Gospođice Kristal B trideset šest ?
Siouplaît, comment on dit la Hollande en croate, dîtes le moi, siouplaaaîîît !!!
Et pourquoi que j’arrive jamais à dépasser le niveau 8 et les 25804 points au Tetris ?
Tout ça est entrain de me tuer, si tant de questions, si peu de réponses à ces conneries qui m’apparaissent d’une importance capitale. Je grelotte dans ma passerelle, pourtant la clim’ est en branchée, réglée sur 23°C. Je me suis taillé un poncho dans une couette et j’ai racheté à un de mes matelots d'ébène son bonnet de laine, 10000CFA l’enfoiré, enculé qui profite de la détresse de son toubab de commandant : Il l’a payé 500 à tout cassé au marché de F..T..T.. une copie à l’effigie de Pooh, le tigre de Disney avec 2 oreilles frangées sur les côtés. Pitain la touche ! 
Le premier qu’a la témérité d’essayer de me filmer ou de me photographier, j’lui écrabouille les muqueuses.

7ème jour depuis la visite impromptue de Maria Palud, c’en est trop et j’en peux plus. J’ordonne à mon second de prendre les rênes du navire et de me ramener au port. 
Je ne débarque pas pour la clinique. On m’y débarque. Quasiment à l’horizontale. Tout le monde croit que je vais crever. Y’m’pèsent pour calculer les doses qu’ils vont m’injecter dans les veines avec leurs perfs. 62kgs ! J’ai perdu 12kgs en 7 jours. Ils me plantent un baxter et y branchent trois tuyaux.
Rhhhhââââ lovely…., en très peu de temps grâce à la quinine qu’on m’injecte directement dans le système, la fièvre qui me consume se refroidit, la morphine m’emmène en lieu sûr, les yeux de Cristalle B ma Louve veillent sur moi depuis le plafond crémeux et craquelé avec amour et bienveillance. 
Pour la première fois depuis une semaine, je dors comme un bébé. Trois jours de clinique, 72 heures sous perfusion et je renais.
Aujourd’hui je m’interroge. Pourquoi est-ce l’A....a et non pas moi qui a calanché ? Maintenant que j’y repense, je vois deux réponses. J’étais dans un tel coaltar, une mélasse tellement noire et sirupeuse que la grande faucheuse n’y voyant plus queudalle ne savait plus par où me faucher. 
Et aussi, accessoirement, parce que j’avais accepté de me laisser piquer. Trois fois s’il vous plaît. Bon, d’abord par un enculé de moustique je vous l’accorde, mais ensuite par une amour de médecin à peau d’ébène.

Quant à l’A....a, c’est la rouille qu’avait piqué sa vanne basse de prise d’eau de mer (50cm de diamètre à 6 m sous la flottaison) et je plains son commandant. Ça va pas être de la tarte pour lui quand il va devoir s’expliquer devant le Tribunal Maritime et devant ses pairs dans son pays. Je donne pas cher de son brevet et de ses prérogatives. 
Abandon de son navire toutes portes étanches ouvertes à tous les vents, à toutes les eaux, bref, à tous les maux. Rien de fait ou de tenté pour colmater la voie d’eau à l’aide d’un paillet Makarov tant qu’il était encore à l’ancre nez dans la houle et que c’était possible. Refus d’assistance - transfert de moto-pompes - quand c’était aussi possible par peur de froisser un peu de tôles sur ses bossoirs - non mais je rêve ! 
Et le pire de tout, aller se faire repositionner sur Y...... Bank près de la Pointe Z, où la houle résiduelle des tempêtes hivernales australes démultipliée à cause des hauts fonds a fini de l’aider à chavirer. 
Je souhaite à personne de partir en croisière avec un commandant de cet acabit. Pauvre capitaine qui s’est laissé mené par le bout du nez par la cellule de crise de son affréteur et par le commandant d’un autre navire de son propre armement. 
Qui n’a pas su – ou pas voulu – user de son « overriding authority » pour outrepasser les ordres de la cellule de crise mise en place par son armateur. Devait être comme moi, devait plus avoir toute sa tête sur ses épaules en ces moments de stress. 
Pourtant, dans notre jargon maritime moderne et selon l’article 5.2 du code ISM (International Safety Management) , le commandant d’un navire possède cette « Over-riding Authority » et a la responsabilité de refuser, quelles que soient les circonstances ou la situation, tout ordre ou directive émanant de son propre armement, de son affréteur ou de son client concernant tout ce qui pourrait mettre en péril la sécurité et/ou l’intégrité de son bâtiment - ainsi que la prévention des pollutions.
Quant à moi aujourd’hui, ça va, j’ai repris du poil de la bête. Voilà maintenant une semaine que je suis sorti de la clinique et je commence à reprendre et des forces et du poids même si je souffre encore de quelques crampes à l’estomac. 
Ça va me prendre une paire de mois d’après le médic avant de revenir à 100%. Mais au moins, je suis vivant et tout entier.

- Hey Ivo, what do you name the Netherlands in croatian?
- That's Nizozemska, captain', it means low land.
- Woah, please, spell it for me, will'ya?
- Right, hem, that's November India Zulu Oscar Zulu Echo Mike Sierra Kilo Alpha.
- Jeez, thanx Ivo. Maybe you won't believe this but I think you just saved my life...