28 août 2006

196. Les hydres de l'esprit



« Tu veux sortir ? On pourrait aller se voir un film, ensuite on pourrait aller bouffer… »
« Non. Je préfère rester à la maison. Je vais nous préparer un petit quelque chose, ensuite on fera l’amour… »
« Ouah ! Ça a l’air de vachement bien te réussir, le Prozac ! »
Woody Allen et Charlotte Rampling dans un des films à Woody. (Stardust memories - 1980)

Le Prozac est un médicament pour traiter la dépression. À ce qu’il paraît, il agit en rétablissant les niveaux de sérotonine disponible dans le cerveau. Le Prozac empêche la réabsorption de la sérotonine par les neurones, en élevant ainsi artificiellement la quantité. La sérotonine est un neuro transmetteur qui met en communication diverses cellules dans notre cerveau.
Mais le Prozac ne guérit pas la dépression en soi, il en adoucit seulement les symptômes - le patient se sent mieux, se sent plus fort afin d’entamer sa propre récupération. 
Je vous donne un exemple tiré d'une blague croate: Mouyo, cueilleur d'olives, va chez le médecin du village, car chaque fois qu'il monte dans un olivier pour la cueillette, il est pris de peur et de vertiges à tel point qu'à chaque fois, il fait dans sa culotte. Le toubib lui prescrit du Prozac et lui demande de repasser dans un mois pour faire le point. Un mois plus tard, Mouyo retourne chez le toubib:
- Alors, Mr. Mouyo, comment ça se passe ?
- Bah, je fais toujours dans ma culotte en grimpant dans le branches, mais je m'en tape !

Un fait primordial – le traitement aux anti dépresseurs s’améliore énormément s’il s’accompagne d’exercices physiques – la danse, le vélo, la marche, le jogging, la nage, le sexe, une activité physique quotidienne de 30 à 60 minutes est cruciale dans la réussite du traitement.
La dépression puise ses forces dans les frustrations. Les frustrations ne sont pas seulement coupables des dépressions, mais encore de nombres de violences dans notre monde. Une des forces les plus destructrices pouvant émerger d’un organisme est la force négative de la frustration. Il n'y a qu'à regarder tous ces politiciens qui nous encadrent.
Il y a des moteurs biologiques internes qui entraînent les organismes à réagir. Ce sont des moteurs génétiques, élaborés depuis des millions d’années d’évolution et chargés de la saine maintenance de l’organisme.
On les nomme ‘pulsions’ ou ‘dynamiques’. Ils sont en général fort simples – la pulsion de la soif, de la faim, du sexe, du jeu, de l’exploration, de l’expérimentation… etc.
Chaque pulsion possède son propre mécanisme de contrôle - nous pouvons les contrôler mais fatalement nous devrons suivre leurs ordres à un moment ou à un autre. Réprimer ces pulsions internes trop longtemps et tôt ou tard nous atteignons cet état : soit la violence soit la dépression. Parfois, les deux ensembles.
Une grande quantité de déchets culturels nous conduit à réprimer nos pulsions les plus élémentaires. Et ces répressions fonctionnent aussi bien au niveau individuel que social.
Les religions et leurs mécanismes d’accusation ‘divine’ par exemple [le remord du pécheur ou de la pécheresse] ont transformé nombres de ces pulsions naturelles, saines et normales, en motifs de peur et de repentir. Questionnées socialement et jusqu’à l’auto condamnation.
Une grande quantité de philosophies, de choix politiques et même d’effets de mode vont aussi dans ce sens.
Nous sommes incapables de couper les branches de notre arbre génétique. Nous ne pouvons nier notre essence biologique. Nous sommes des animaux, pas des petits saints, ni des anges. Des animaux – quand nous commencerons à reconnaître sans honte notre véritable nature et que nous nous libérerons des mythes que nous avons créé sur l’origine divine de notre existence, à la recherche de buts eux aussi ‘divins’ ou ‘paradisiaques’ – nous aurons entamé notre parcours vers la guérison de nombre de dépressions chez l’homme.
Et de nombre de violences.
Et de nombres d’autres maux de l’Humanité.