23 janv. 2006

133. Réflexion périphérique

Et n'allez surtout pas croire si facilement que j'essaie par ce post de contourner les œillères dont je parlais dans mon post précédent. Ce serait plutôt l'opposé du contraire, lol... D’abord, et pour que ce qui va suivre soit plus clair, il serait peut-être bon de noter que seuls ceux ayant atteint les sommets du pouvoir sont capables de se livrer aux sommets de l’auto déception. En grande partie à cause de ce que je nommerai, faute de mieux, participation périphérique, participation par laquelle les vrais intérêts ou activités sont remplacés par des images. Et ceci est la conséquence naturelle de la monotonie engendrée par la surabondance matérielle. 
C’est vrai, jamais encore dans l’histoire humaine n’avons-nous pu témoigner d’une économie aussi débordante…, mais voyez aussi le genre de connards que ça fait de nous ! J’ai toujours eu une réponse succincte envers la théorie qui veut qu’un progrès compétitif et fulgurant ne crée que de la discrimination dans le marché des consommateurs, ce qui en retour engendre un climat propice à une compétition encore plus vigoureuse : les boules ! 

Quelle est la véritable signification , je vous le demande, de la plateforme radicale originale de Lénine – Terre… Paix… Pain – dans un monde de bobos et de prolos boudeurs du début du 21ème siècle ? Je parle pas ici de silos à grains qui débordent, ou de barges de choux-fleurs jetées à la mer au large de Saint Pol de Léon, ou encore d’agriculteurs payés pour détruire leurs récoltes, mais de l’économie fondamentale basée sur trois locutions : plus neuf, plus grand, plus moderne. A quel stade le progrès et la sophistication cessent-ils d’être bénéfiques ? Ou serait-ce que nous n’aurions pas utilisé notre intellect et nos capacités créatrices avec discernement ? Qui, après tout, a réellement jamais eu besoin d’une brosse à dents électrique ? 
Prenez Sochaux, pendant de nombreuses années la cible de mécontents du volant. La plupart des Peugeot, proprement entretenues et conduites, devraient rouler au moins trois cents mille kilomètres avant de rendre l’âme, en dépit de leur obsolescence planifiée. Mais nous avons aussi droit au mythe de la séduction, promu par des campagnes de publicité interminables dans les médias, d’un bolide aérodynamiquement ciselé conduit pied au plancher par un félin musclé accompagné, dans le baquet passager, d’une pulpeuse lolita aux seins rebondis. Nos taux d’accidents témoignent du fait que trop de porcs grassouillets s’identifient au félin musclé, et peut-être même que les prononciations de divorce tracent une indication parallèle sur le désir d’un nombre non négligeable d’occidentales de se retrouver dans le siège baquet. Notre femme, la femme occidentale – look pop art, cheveux repassés et gélifiés, jeans ras la moule, Tampax phalliques, peut faire tout ce qu’elle veut – sauf pisser debout, j'en conviens. Jamais encore dans l’histoire n’y a-t-il eu une race de femmes si catégoriquement dédiée, pas seulement à être un cul en chaleur carburant au pognon, mais en plus à essayer d’être drôle.
Malheureusement, l’obsession de baiser et/ou d’offrir une bonne baise est, trop souvent elle aussi, périphérique. Quelque part en cours de route, quelque chose d’inimaginable est arrivé – les méchants ont gagné !
Le monde est absolument hors de tout contrôle désormais, et ce n’est ni la raison ni la déraison qui vont le sauver. Une des dernières libertés qui nous reste dans ce monde de feux de signalisations, d’impôts sur les revenus, de conscience diététique et de pics horaires de pollution, c’est la liberté de zapper sur n’importe quelle putain de chaîne des bouquets sur le marché.