1 déc. 2022

696. La malédiction du druide


 LA MALÉDICTION DU DRUIDE

Cette petite histoire ne vous est pas gracieusement offerte grâce au soutien financier de la maison BALENCIAGA

C'était une soirée paisible. Les oiseaux piaillaient leurs berceuses à leurs petits pour les endormir et les goupils se glissaient dans leurs tanières.
Soudain, deux femmes surgirent de nulle part. L'une semblait chasser l'autre en jurant à voix basse.
" Morgane ! Morgane, arrête-toi !" poussait la poursuivante en cavalant au cul de celle qui foutait le camp.

Elle la rattrapa et l'agrippa par un poignet. Morgane, arrête ! Tu n'as aucune idée de ce que tu fais !"
Morgane regarda l'autre femme. " Je m'en tape, Viviane. Je protège mon enfant.
- Les druides ont déjà pris leur décision ! Tu pourrais te faire tuer pour une telle tromperie !" s'exclama Viviane.

Morgane arracha son bras de la poigne à Viviane. "Je m'en fous."
Elle se retourna et s'éloigna.

Viviane invoqua la magie de la terre et fit s'étendre une branche d'arbre caoutchouteuse en direction de Morgane. L'organe végétal s'enroula autour des chevilles de cette dernière, la maintenant en place. " Moi je m'en fous pas, Morgane. Je ne veux pas qu'il arrive quoi que ce soit à toi ou à ton fils. Mais ce -" elle fit un geste autour d'eux. " Cela ne résoudra rien. Ils découvriront ce que tu as fais, et puis quoi après ?"

Morgane cessa de se débattre avec la branche et lança un regard noir à sa sœur. " Je fais ce que je pense être le mieux pour mon enfant." elle tira une dernière fois et libéra ses chevilles. " Rien de ce que tu diras ne m'arrêtera."
Viviane pencha la tête. " Vraiment ? Et si je décidais de te dénoncer, est-ce que ça t'arrêterait alors ?
- Tu n'oserais pas." gronda Morgane .

Viviane ouvrit la bouche pour revenir en arrière, mais Morgane s'était retournée et était déjà repartie de l'avant. Elle remonta ses jupes et la suivit. Morgane, attends-moi !"

Elles trottèrent en petite foulée jusqu'à ce qu'elles atteignent un fort ou ce qu'il en restait qui ne consistait que de décombres. Viviane resta bouche bée devant le panorama, puis se tourna vers Morgane.
" As-tu perdu la tête ? C'est le vieux fort romain de Laudanum ? Qu'est-ce que tu as en tête ?"

Morgane l'ignora et s'enfonça plus profondément dans les ruines.
Viviane émit un juron et resserra sa cape autour de ses épaules. Elle regarda autour d'elle la destruction, et il y avait des choses partout. Des corps squelettiques traînaient et des vêtements jonchaient le sol. Les maisons n'étaient plus que  des tas de briques et de poutres en ruines ou calcinées.

Au loin, elle vit des trous fraîchement creusés avec des croix de bois plantées à l'envers devant les tombes.
Quelqu'un était venu ici - récemment.
Viviane se dépêcha de rattraper Morgane. Elle invoqua plus de magie de la terre et utilisa la boue et les mauvaises herbes autour d'elles pour piéger les jambes de Morgane dans le sol.

Morgane se tourna vers elle. " Que fais-tu?
- J'essaie de te protéger." siffla Viviane. " Comment as-tu pu faire quelque chose d'aussi stupide ? Nous avons voyagé pendant des jours, et c'est tout ce que tu as trouvé ? Amener ton enfant dans une ruine romaine ?
- J'arrive pas à croire que nous nous disputions à propos de ça !" grogna Morgane. " Libère-moi ou au moins aide-moi."

Viviane secoua la tête. " Non, il doit y avoir un autre moyen de protéger-
- Et s'il y en avait un, tu crois pas que je l'aurais déjà fait ?" Elle retira sa cape, révélant un paquet de couvertures, " Arthur a besoin d'un endroit sûr pour grandir, Viviane. Je sais que c'est risqué, mais s'il te plaît, donne à Arthur une chance de vivre."

Viviane soupira. " Mais tu sais que tu ne pourras plus jamais le revoir, n'est-ce pas ?"
Morgane hocha la tête.

Viviane donna un petit coup de poignet et la boue s'éloigna d'elle. " Eh bien, qu'est-ce que tu attends ?
- Tu… tu ne viens pas ?
- Cours !"

Morgane hocha la tête et se mit péniblement en marche avec son bébé. Viviane vit au loin la destination vers laquelle elle se dirigeait.
C'était la seule maison debout dans le champ de ruines dont toutes les briques et le toit étaient intacts. Elles atteignirent la porte d'entrée dix minutes plus tard, et un jeune homme ouvrit la porte.
Il avait les yeux vert foncé et la peau pâle d'une vie passée à l'intérieur, et ses cheveux tombaient sur ses épaules dans un désordre graisseux. " Puis-je vous aider?"

Morgane lui montra le bébé endormi et lui expliqua qui elle était et pourquoi elle était là.
Les yeux de l'homme s'écarquillèrent, il sortit la tête et regarda autour de lui. " Vous êtes sûres que personne ne vous a suivies ? Entrez vite !"

Tandis que Morgane franchissait le seuil, Viviane remarqua le bruissement des feuilles d'un buisson. Après une inspection plus approfondie, elle réalisa que le buisson portait des glands.

Elle s'inclina, se retourna et entra dans la maison. La maison de l'homme était chaude et étouffante.  Ça sentait légèrement le chanvre et la cannelle. L'homme s'assit sur un canapé miteux dans un coin et croisa les jambes.
" Alors vous êtes Morgane, hein ?" l'homme pencha la tête. " J'ai reçu votre commande pour votre nouvelle robe il y a des semaines, mais je n'avais aucune idée que vous passeriez aujourd'hui !"

Viviane fronça les sourcils et croisa les bras. " Pouvez-vous me dire qui vous êtes ?"

L'homme hoche la tête. " J'en serais ravi. Je m'appelle Lanculus Balenciaga ." Il fit un signe de tête vers le paquet de couvertures. " Est-ce que c'est lui?"
- Il s'appelle Arthur."

L'homme fixa le bébé pendant quelques secondes avant de tourner son regard vers les deux sœurs. " Pouvez-vous me dire pourquoi vous faites confiance à un romain avec quelque chose d'aussi précieux que ce truc ?"

Morgane soupira. " Mon fils est né avec des pouvoirs élémentaires et les druides détestent tout ce qui n'est pas divin. Après mon accouchement, un druide m'a rendu visite et m'a dit qu'ils devraient le tuer en sacrifice aux dieux." Morgane lui passa le poupon enveloppé dans son paquet de couvertures. "J'ai pensé qu'il serait plus en sécurité avec un romain."

Lanculus acquiesça. " J'espère pouvoir le garder en sécurité à condition que personne ne vous ait suivies." Il jeta un coup d'œil à Viviane. " Eh bien, si c'est tout, vous feriez mieux de partir."

Morgane remercia Lanculus et elle et Viviane quittèrent la maison rapidement.

Avant même qu'elles n'aient quitté le vieux fort romain, des gens vêtus de manteaux blancs sortirent de derrière des décombres et les  encerclèrent. Une personne portant une robe violette s'approcha d'elles et baissa sa capuche.

Morgane haleta. " Merzhin ? Qu-qu'est-ce que vous faites ici ?"
Merzhin fronça les sourcils. " Ne fais pas l'idiote. Ta sœur nous a prévenus de ta trahison. Où est le garçon, montre-le-moi, et peut-être que j'épargnerai ta vie."

Morgane se mit à gémir et à crier à quel point c'était injuste, puis elle se tourna vers sa frangine et lui colla une baffe.
" Comment as-tu pu me faire ça ?" cria-t-elle. " Je pensais que tu tenais à moi et à mon fils ?"

Viviane trébucha en arrière et se colla une main sur la joue, pas de douleur mais de surprise. Elle lança un regard noir à Morgane. " Je tiens vraiment à toi, mais tu ne te mettais pas seule en danger, Morgane. Ils nous auraient tous tués s'ils avaient découvert ce que tu faisais. Tu devrais me remercier."
Cette dernière ricana. " Te remercier ? As-tu perdu la tête ? Te remercier de quoi ? D'avoir ruiné ma vie ? Une fois de plus ?"

Merzhin fit signe à quelqu'un derrière lui, et deux hommes vêtus de capes rouges sortirent de la foule vêtue de blanc. Merzhin pencha la tête et regarda au loin. " Votre sœur a raison. Errer seule sur le territoire romain vous ferait tuer. Je suppose que votre fils est caché en toute sécurité dans cette maison là-bas, n'est-ce pas ?"

Morgane ouvrit la bouche pour répondre mais la referma et serra les poings.
Merzhin hocha la tête et conduisit les hommes en rouge vers la maison.

" Non!" cria Morgane. " Non ! Arrêtez ! Ce n'est qu'un bébé ! Un nourrisson !"

Morgane prit son élan pour courir après Merzhin, mais Viviane lui emprisonna les pieds dans le sol.
Morgane lutta et jura. Puis elle ferma les yeux et commença à se transformer en Poutine putain d'ourse de Sibérie.

Les hommes en blanc regardaient avec peur et horreur dans les yeux. Viviane recula sous le choc.
Morgane rugit et balança une patte renversant une poignée de capes blanches. Viviane se baissa pour éviter le deuxième coup de patte et roula derrière un tas de décombres. Elle savait que Morgane était pratiquement invincible sous cette forme. Mais Viviane l'avait déjà battue avant, et elle était sûre qu'elle pourrait le refaire.

Elle sortit de derrière le tas de décombres et invoqua la magie de la terre. Elle souleva le tas de pierres à côté d'elle dans les airs et les projeta sur Morgane mais cette dernière les balaya dans les airs tel un nuage de confettis.

Viviane se baissa derrière un autre tas de briques.

La magie de Morgane et de Viviane était contrôlée par leurs émotions, donc si Viviane était capable de créer suffisamment de colère, sa magie pouvait être aussi grande et puissante que celle de Morgane. Mais Viviane n'avait pas changé de forme depuis qu'elle avait eu ses six ans.

Viviane regarda frénétiquement autour de la clairière à la recherche d'un endroit sûr où se métamorphoser.
Elle ferma les yeux et s'imagina comme un grand loup. Elle baissa les yeux sur ses mains et les vit se transformer en grosses pattes griffues de la taille d'un grille-pain, ses oreilles surgirent sur sa tête et ses dents s'allongèrent en s'aiguisant, une véritable bête du Gévaudan surdimensionnée sortie toute droite du trou de balle de Belzébuth..

Viviane se retourna et vit Morgane s'emparer d'un homme en blanc et le déchirer en deux. Elle recracha le haut du corps et jeta l'autre dans la foule des hommes en blanc qui criaient et couraient de terreur en chiant dans leurs brailles.

Morgane se retourna et se moqua d'elle. "Ah, Viviane. Toujours un pet pas de retard."
Viviane ignora ses moqueries et scanna son corps poilu, essayant de se rappeler où étaient ses points faibles.

Morgane la frappa, elle fit une roulade et se remit sur ses pattes. Viviane courut et a sauta sur le dos de Morgane. Elle la niaqua bien comme y faut entre les omoplates et Morgane rugit.
Elle tendit la main derrière elle, attrapa Viviane par la gorge et la projeta en l'air. Viviane atterrit sur un tas de briques avec un gémissement. Elle se releva péniblement et chercha Morgane des yeux.
Cette dernière courait droit sur elle.

Viviane se força à se relever mais s'écarta à peine à temps. Morgane taillada et lacéra son museau et sa joue gauche.
Viviane trébucha et secoua la tête, essayant de s'éclaircir les neurones qui marchaient encore.

Morgane courut à nouveau vers elle mais cette fois elle était prête, elle bondit et sans réfléchir referma ses puissantes mâchoires pleines de dents dans la partie tendre du cou de l'ourse.

Morgane émit un gargouillis en la repoussant.
Lorsque Viviane toucha le sol, elle reprit sa forme humaine et se cacha derrière un tas de gravats.

Morgane se balança sur ses pieds pendant un moment avant de s'effondrer, envoyant des briques, de la terre et de la poussière partout.

Viviane jeta un coup d'œil hors de sa cachette et vit sa sœur allongée au sol, immobile.
Elle bondit et courut à ses côtés. Morgane ne respirait plus...

À travers la poussière et la fumée, trois silhouettes s'avancèrent vers elle. Merzhin et les deux hommes vêtus de rouge.
Merzhin regarda le corps avec dégoût. " Il semblerait que l'enfant et le sale pédophile Lanculus Balenciaga  aient disparu." il pencha la tête. " Que s'est-il passé ici?"
Viviane secoua la tête.
" Tu avais reçu l'ordre d'empêcher ta sœur et son marmot de quitter votre chaumière. Par ta faute, l'enfant va énormément souffrir avant de mourir." soupira Merzhin. " Mais merci quand même d'avoir protégé mes acolytes." Il posa une main ridée sur son épaule. " Mais ne t'en veux pas, Viviane chérie, tu as fait exactement ce qu'il fallait faire."
Réalisant son double crime, Viviane se cacha le visage dans les mains et éclata en sanglots avant de se transformer en anguilleuvre et de disparaître dans la boue.

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