14 févr. 2007

232.Cette enfoirée de fleuriste au restaurant


Vous savez comment l'homme aime ce qu'il aime s'offrir et le déteste quand c'est du domaine de l'impossible. Alors voilà, ça fait exactement 108 jours que je me fait chier loin de ma louve sur mon rafiot en Afrique, j'en ai encore combien à tirer? Devinez? Dîtes 33!
La Saint Valentin cette année, moi et ma louve pouvons donc tirer une croix dessus. Mais je vais pas me démoraliser tout seul, c'est pas rigolo. Je m'en vais donc vous démoraliser aussi un tout petit peu. M'en veuillez pas si je suis partageur, okay?

La Saint Valentin, comme nombre d’autres jours qui entraînent l’action, l’interaction et les attentes de l’homme, n’est rien de plus qu’un piège de plus inventé par le commerce libéral pour extorquer de l’argent des mains de ces mêmes hommes.
C’est l’équivalent d’un mauvais lascar menaçant votre intégrité physique si vous ne lui lâchez pas votre portefeuille. Vous n’avez pas d’autre choix que de lui donner votre pognon pour sortir de la zone rouge et retomber en zone neutre. Mais vous ne vous en sortez pas neutre comme on pourrait le supposer puisque vous y avez laissé des plumes thunes. Vous me trouvez un petit peu trop extrême ? Mais voyons, pas le moins du monde!

Comme tout Bouddhiste le sait, les hommes participent d’un cercle sans fin dans lequel, après avoir vu, ils ont envie, et cela les attristant, il achètent et il consomment afin de retrouver à nouveau les grands calmes de la zone neutre. Maintenant, les publicitaires bombardent les hommes à longueur de journées avec des images qui les rendent moins heureux en leur faisant prendre conscience de leur pseudo-démunition.

Sont ils le Mal ? Oui, mes frères, effectivement, ils le sont.
Ils promeuvent le crime et la guerre et rendent notre monde abject, mais au moins ils financent les chaînes de télé et de radio et subventionnent les prix bas de quantités de magazines et autres canards. Pour le malheur qu’ils engendrent, certains d’entre nous ont droit à du Patrick Sébastien en retour.

Putain, même ici à Pointe Noire, ils ont réussi à Con-Gauliser les congolais. La radio Ndjindji (90.5 FM) n’arrête pas de causer de la saint Valentin comme si le monde venait de s’arrêter de tourner. Partout des stands à la sortie du port avec des cœurs rouges, des fleurs, des cartes et des boîtes de parfums de troisième zone à l’étalage.
Mais bordel, qu’est ce qu’elle en a à secouer, la congolaise, qu’on lui offre une carte, un parfum ou un bijou ? Nan, ce qu’elle veut, elle, c’est que son homme lui ramène un beau capitaine à la case – vous méprenez pas, je cause de poisson là – accompagné d’un gros sac de riz, de manioc ou de foufou premier choix, à la rigueur un drap de pagne afin qu’elle puisse confectionner son prochain boubou pour quand celui qu’elle porte en ce moment se sera effiloché à l’usure. 
Elle lui offrira en retour un peu de bois bandé ou de racine de mindjoudjou afin de transformer la nuit à venir en hymne à l’amour.

La Saint Valentin, c’est juste comme cette enfoirée qui vient vous faire chier au restaurant avec ses boutons de roses rachitiques. Elle se pointe, interrompt votre vie, vous embarrasse et vous laisse dans un dilemme dont vous sortirez vaincu.
Approchez m’sieurs-dames, c’est facile comme Basile, tranquille facile dans le mille ! Soit vous achetez les fleurs à votre autre vous et vous ressemblerez à un beauf pressé par la société pour acheter un truc de merde dont ni vous ni elle n’aviez besoin, soit vous les achetez pas et vous ressemblerez à un enfoiré de roi des cons de rat d’Écosse.
L’enculé de patron de la petite marchande de fleurs se fait du blé en l’envoyant semer le malheur jusque dans le coin le plus intime de votre restaurant de prédilection – peut-être celui où vous vous êtes rencontrés.

Les couples n’ont rien à gagner à la Saint Valentin car il ne s’agit pas d’un échange de fluide mais d’un échange de fric. Les deux doivent raquer. Et à la différence de ce qu’on s’offre pour Noël, ça doit demeurer des cadeaux IN-utiles, genre des fleurs, des cartes ou des bijoux.
Le mieux que vous puissiez encore faire, c’est lui payer des chocolats, pour peu qu’elle fasse un peu de régime, vous retomberez au moins sur trois pattes. En plus de ça, il faut pas se laisser distancer par les Dugland ou les Ducon, vous devez faire mieux qu’eux, vous dépasser et, dans tous les cas, faire mieux que l’année dernière.

Et alors, pour les célibataires, c’est le plus pire du pire de tout. Ce jour là pour eux, c’est l’enfer tandis qu’on leur rappelle partout et constamment leur solitude.

Et n’oublions surtout pas nos petites têtes blondes à qui les maîtresses de France et de Bretagne demandent de confectionner et d’écrire des cartes d’heureuse saint Valentin à leurs voisin/voisines de table. Imaginez le stress entre leurs petites tempes tandis qu’ils mordillent leurs crayons jusqu'à s’en rougir les dents - tels des abyssins de la mer Rouge à Monfreid shootés au khât - en tentant en vain de refuser d'imaginer l’interprétation que vont en faire leurs petits destinataires…